Passage de témoins
Quelles traces, physiques ou immatérielles, du D-Day reste-t-il sur le territoire ? Comment les souvenirs se transmettent-ils d’une génération à l’autre ? Qu’est-ce que l’histoire officielle a effacé ? Comment commémore-t-on : après la guerre, aujourd’hui et demain ? Comment les jeunes de l’intercommunalité s’approprient-ils cet héritage ?
Tels étaient les questionnements à l’origine de la commande passée par le Cube au collectif de journalistes caennais Grand Format à l’occasion du projet de territoire de la saison 23-24 et des célébrations du 80ème anniversaire du Débarquement.
Pour répondre à toutes ces interrogations, les journalistes Marylène Carre et Simon Gouin et aussi le photographe Emmanuel Blivet ont passé 6 semaines en résidence sur le territoire de Coeur de Nacre, entre octobre 2023 et juin 2024. Après avoir lancé un appel à participation auprès des habitants pour former un collectif d’apprentis journalistes, ils ont entrepris une vaste collecte de récits et de témoignages, d’objets et de photos, racontant les histoires locales connues ou oubliées liées au Débarquement. En allant à la rencontre de personnes âgées ayant vécu la guerre, en accompagnant des jeunes de la MJC de Cresserons en photoreportage au musée du Radar de Douvres ou encore en missionnant des scolaires, primaires et collégiens, pour écrire des articles à partir d’interviews d’habitants ou de proches. Au total 273 participants (78 personnes interviewées et 195 apprentis journalistes dont 175 élèves) ont participé au projet et nourri l’enquête « Passage de témoins » spécialement créée pour l’occasion, consultable ici.
Le samedi 14 juin 2024, une soirée exceptionnelle a rassemblé le collectif Grand Format et des participants de tous âges (enfants, adolescents, adultes et seniors) pour restituer de manière vivante toute la matière collectée pendant plusieurs mois.
Les journalistes ont présenté leur démarche.
Élèves et habitants se sont fait les porte-paroles des témoins interrogés en lisant des extraits de leurs récits.
Toutes ces lectures étaient ponctuées de pièces musicales interprétées par l’orchestre symphonique ERATO dirigé par Gilles Treille.
En parallèle des indispensables cérémonies d’hommages et des nombreuses festivités et évènements touristiques organisés pour célébrer le D-Day, cette soirée a permis de redonner aux habitants de Cœur de Nacre une place particulière dans ces temps de commémoration. Elle a rappelé que derrière la grande histoire du Débarquement, se cachent des milliers d’histoires intimes, souvent douloureuses, transmises ou cachées, de génération en génération. Presque en marge des hommages rendus aux libérateurs et des bals en costumes vintage célébrant la fin de la guerre, ces souvenirs encore vifs des plus anciens et les nombreuses empreintes familiales laissées chez les plus jeunes ont rappelé la complexité et l’absurdité des temps de guerre. Un devoir de mémoire nécessaire pour ne pas oublier la violence des évènements, même s’ils ont conduit à la libération (la majorité des victimes civiles en Normandie ont été tuées sous les bombes du Débarquement), rappeler les sentiments parfois mitigés de la population vis-à-vis des alliés et des allemands et surtout reconnaître les traumatismes importants laissés dans les mémoires individuelles et collectives des habitants.
Et parce que les traces physiques autant que les souvenirs des anciens tendent à disparaître, le collectif Grand Format a souhaité laisser plusieurs traces durables de cette enquête participative. Le site internet « Passage de témoins » regroupe toutes les photos et témoignages. Une série de 10 cartes postales avec des photos de témoins, paysages ou lieux a été éditée. Enfin, une exposition itinérante avec les photos d’Emmanuel Blivet et des extraits des témoignages collectés a été présentée dans divers lieux du territoire.
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